Tu soupires longuement ouais, évidemment. J'ai constamment besoin d'avoir le contrôle. J'ai constamment besoin d'être aimé, d'être important. À la longue c'est pesant. Tu te recule sur ta chaise, racle ta gorge de nouveau j'ai commencé à aller à Los Angeles vers 11-12 ans, pour voir mon jumeau l'été et à noël. Il avait une foutue belle baraque. T'ris brièvement puis poursuit vers 14 ans on est déménagés à New-York. Tu t'arrêtes, fronce les sourcils et secoue la tête. Non t'arriveras pas, ça coince dans ta gorge.

Tu l'écoutes attentivement, tout comme le reste du groupe d'ailleurs. L'intervenante hoche la tête, elle arrive un peu mieux à peindre le tableau. Charlie explique qu'il a commencé à visiter son frère ici, à LA, pendant son adolescence... et à ses 14 ans il a emménagé à New York. C'est une nouvelle pour toi aussi, il ne t'a jamais précisé d'âge ou de date avant aujourd'hui. Et comment s'est passé ton déménagement ?

C’était comment le déménagement, Charlie ? Tu réfléchis un peu, revenant 11 ans en arrière. Le petit cul de 14 ans que tu étais. C’était effrayant. J’perdais mes potes.. ma petite-amie de l’époque.. j’arrivais dans une ville où j’connaissais personne. J’ai eu 15 ans cet été là, avec mon frère.. heureusement que j’étais venu le voir sinon j’aurais été vraiment seul. Pas d’amis, une mauvaise relation avec tes parents.. c’était pénible ! Mais j’étais sportif alors j’suis rentré dans l’équipe de basket du highschool et j’ai connu mon meilleur ami Zack. On déconnait vraiment ensemble et on s’amusait beaucoup. Tu souris doucement à cet aveu j’étais le p’tit nouveau, sportif et fanfaron. J’avais des potes, ça pas été long, heureusement ! Mais d’autres qui étaient là depuis longtemps avait pas cette chance. Durant toute l’année, y’avait cette fille qui s’faisait toujours intimidée. Constamment. Les filles populaires qui passaient près d’elle et qui faisait tomber ses livres, les mecs qui la surnommaient de façon complètement dégradante parce qu’elle avait un peu d’poids.. tu fixes le sol, appuyer sur tes genoux de tes coudes. T’soupires vers la fin de l’année, y’a eu une fille qui la lâchait pas depuis le début de l’année.. elle la délibérément poussée dans une case, gratuitement pendant que les autres riaient.. j’étais avec Zack et un autre gars.. j’ai lâcher mon sac et j’suis aller l’aider.. cette fille. J’en avais marre de la voir s’faire malmenée.. tout à coup sensible, ta voix s’casse et tu t’arrêtes un peu. Tu souffles on a passés l’été ensemble avec Zack.. et ensuite.. on est devenus inséparables. On trainait ensemble avant, pendant et après les cours. J’allais la chercher le matin pour faire la route à pied ou en bus.. on dînait toujours ensemble et c’était triste au début parce qu’elle parlait beaucoup. Mais elle parlait d’ses rêves, d’ses passions et elle s’excusait d’le faire.. ahah ça m’rendait dingue parce qu’elle avait les yeux brillants quand elle en parlait et j’voulais voir ça. M’enfin j’m’égare excusez-moi ahah.. t’parles trop Charlie. Ta gueule.

Et la partie la plus difficile, celle qu'il repoussait depuis des années, commence maintenant. Charlie se met à parler de sa nouvelle vie à New York... De sa rencontre avec Zack, que tu ne connaissais toujours pas. Il t'a menti pendant presque une année complète, Charlie. Tu ne lui en veut pas spécialement, mais ça te fait bizarre de ré-imaginer sa vie. Tu dois tout démêler le vrai du faux et ça te fait bizarre. L'intervenante accumule déjà les questions à lui poser, mais personne autour du cercle ne perd intérêt en ce qu'il raconte ; au contraire, tout le monde est silencieux, tout le monde l'écoute attentivement. Toi y compris. Il se met à parler d'une fille et t'es pas conne, Avana. Tu devines que c'est toi. Tu sais, que c'est toi... Et c'qui te fait mal, là, c'est même pas le fait que tu saches comment cette histoire-là s'termine.

C'est parce que tu avais coupé contact avec tous les gens de ton passé.

Pour oublier fat Avana.

Et les mauvais souvenir reviens au galop. Tu retiens ton souffle, plonge ta main sur ta bouche en fixant le sol. T'es la seule, l'ange, qui ne le regarde pas. T'es la seule qui n'a pas besoin d'le regarder pour être attentive... Parce que tu revis avec lui tous ces mauvais souvenirs. Tu ne te souviens peut-être pas des moments spécifique qu'il raconte, mais oh... Ton calvaire a commencé bien avant qu'il n'entre dans ta vie. Et encore... c'était probablement pire quand il n'était pas là.

Il parle maintenant de la façon dont tu racontais tes histoires et tes rêves. Tu bats des cils et te redresse sur ta chaise pour enfin tourner la tête et le regarder de nouveau. Ça te chavire le cœur, de voir comment il parlait de toi. L'ancien toi. Il le fait avec beaucoup d'amour et c'est douloureux de ne pas t'en rappeler, là, tout d'suite. Ne t'excuses pas, Charlie. Tu semblais bien l'apprécier cette jeune fille... Et elle semble être apparut dans ta vie juste au bon moment. Comment te sentais-tu en sa présence ? Tu retournes tes yeux sur le plancher, gênée.

Tu rigoles doucement, le yeux toujours au sol j'crois que.. j'crois qu'on avait besoin d'l'autre.. vraiment c'était un fifty-fifty.. t'es apparut au bon moment pour elle aussi.. juste à lire son journal pour le comprendre. C'était comme... je sais pas. Elle était drôle. Elle disait toujours d'la merde pour faire rire et c't'ait pire quand elle était nerveuse. Mais même quand mon père me battait.. elle savait rien, mais.. étrangement elle me textait toujours ce soir-là.. pis elle m'disait d'la merde. Comme si elle le sentait. Tu mordilles ta lèvre inférieure et te racle la gorge "ses parents nous apportaient où on voulait.. mais toujours en paire de deux. C'était ma meilleure amie. Y'avait pas une autre personne sur terre.. pas même Zack qui arrivait à la cheville de c'te fille-là. J'crois que j'en était déjà amoureux mais j'le savais juste pas encore. On fumait beaucoup d'herbe. Constamment high à parler d'la vie. On a ris.. on a pleurés, on a criés, on s'est roulés par terre.. on a bus à s'vomir les tripes.. on s'est consolés.. tu deviens émotif, Charlie. Le pire reste à venir elle détestait les partys.. en fait tout c'qui contenait trop d'gens et moi j'la traînais partout. Dans tout les partys, ceux d'mes potes ou d'école.. ahah.. puis y'a eu la folie du bal qui a commencée.. elle m'disait qu'elle irait pas. Mais j'ai tapissé les murs d'écoles pour l'inviter. J'l'ai tellement gossée.. qu'elle a dit oui. T'feel pas bien, Charlie. Vraiment pas, t'renifles.

Vous êtes arrivés dans vos vies, pile au bon moment. Tu n'as pas besoin d'avoir de la mémoire pour savoir ça... At this point, t'avais besoin d'un ami, peu importe de qui il s'agissait. T'avais besoin de quelqu'un qui t'aime, qui te soutiens et qui te fasse sourire un peu à tous les jours. Connaissant Charlie aujourd'hui, tu sais qu'il était un bon ami pour toi. C'est horrible de se dire qu'la meilleure partie de ton adolescence a été oublié... et qu'à la place, tes parents ont préférés continuer de te faire croire que personne ne t'a jamais aimé, à part eux. C'est égoïste. T'apprends au passage que l'ancienne Avana ne savait pas pour sa situation familiale... et un peu après, t'apprends qu'il avait fait une énorme demande pour l'accompagner au bal de promo. Ça te fait tout bêtement sourire... parce que damn... C'est tellement Charlie, ça. De faire les choses en grand, de trouver le moyen parfait pour te convaincre. Il serait capable de t'faire avaler que le ciel est vert, s'il essayait. Le blond devient émotif et ça, ça ne passe pas inaperçu. Une personne autour du cercle se lève et va lui chercher une boîte de mouchoir, pour lui apporter en silence. Prend ton temps... L'intervenante sourit faiblement, en le regardant renifler. Tu appuies ton dos contre le dossier de ta chaise et bat des cils en regardant les gens autour de toi. Quelques personnes te regardent comme si t'étais de trop, mais c'est probablement parce que tes larmes se sont rendus jusqu'à tes yeux, à toi aussi. Ton cœur bat tellement fort qu'on dirait qu'il va exploser. Ça a dû te rendre très heureux qu'elle accepte de t'accompagner, non ?

T'attrapes la boîte de mouchoir et sourit à la personne qui te l'apporte. merci.. Tu te mouche et lève les yeux sur l'intervenante déterminée à t'faire parler hmhm.. j'voulais qu'elle ait le bal qu'elle voulait mais qu'elle osait pas dire. Elle aurait voulu qu'un mec fasse ça, mais elle l'aurait jamais dit. Pas elle. Qui aurait bien pu l'inviter, hm ? Elle aurait dit ; personne. Mais purée, moi j'l'ai pas invité par pitié. J'y serais pas aller sans elle.. j'avais juste elle. Elle voyait au-travers moi, comme si.. comme si elle m'lisait. Elle m'faisait sourire.. rire. Ce soir-là, son père avait loué une belle voiture pour nous. J'avais mon permis depuis 1 an peut-être, mais j'étais si nerveux.. j'avais jamais été si nerveux avec elle. T'essuie ton nez rapidement et bois une gorgée de café ; elle est descendue... j'm'en souviens encore. J'avais jamais réalisé à quel point elle était belle. Je l'savais of course.. mais j'l'a voyais différemment tout d'un coup. Et on avait l'air de deux abrutis un face à l'autre. Aujourd'hui, je sais que j'lui plaisais.. mais à c'moment-là j'le voyais pas comme ça.. on est partit au bal, on a commencer à boire en arrivant. Puis on a continués toute la soirée. On a mangés et Zack faisait un après-bal de dingue.. on est partis vers peut-être 21h du bal, on voulait aller manger, mais finalement on est pas allés, on a commencé a parler qu'elle déménageait en France et moi j'restais a New-York. Elle m'avait dit qu'elle m'aimait et j'avais pas compris le sens sur le coup. On était là, tristes à s'promettent monts et merveilles en sachant que c't'ait over... j'buvais, au volant. J'l'ai apportée sur une montagne pour voir la ville. On a fumé un joint, bue encore plus.. pis on a couchés ensemble. T'y arriveras pas Charlie. T'y arriveras pas. C'était ma première, j'étais son premier.. pis on savait que c't'ai la dernière fois ensemble surtout ahah.. tes joues sont inondés, Charlie.

Il parle de toi à la troisième personne et tu ne peux t'empêcher de te demander si c'est plus facile pour lui de le faire comme ça... ou si c'est par respect pour toi, qu'il ne le fait pas. Quoi qu'il en soit, plus il parle, plus tu commences à verser des larmes et tu te sens coincée. Coincée, parce qu'autant c'est difficile pour lui, ce l'est pour toi... Tu ne te rappelles d'absolument rien dans tout ça. Et ça te fait encore chier de ne pas pouvoir t'en rappeler, de le laisser souffrir comme ça tout seul... T'aimerais pouvoir retrouver ta mémoire et lui apporter le vrai pardon qu'il mérite, mais tu ne peux pas et ne pourra sans doute jamais. Lorsque son récit arrive au point où il parle de votre première fois... Ta gorge se resserre et tu tournes les yeux vers lui pour le regard, malgré les larmes qui coulent sur tes joues. En voyant ses joues détrempés aussi, tu pivotes légèrement vers lui et pose ta main sur sa cuisse. Fuck off, tant pis si tu ne dois rien dire ou faire. Tant pis si vous êtes en publique... Tant pis. T'es là et tu le soutiens dans la démarche, même si ça t'arrache le cœur au passage. ... Si cette fille-là était devant toi aujourd'hui, qu'est-ce que t'aimerais lui dire ? Tu crois que tout le monde le sait, là. Si ce n'était pas évident avant, peut-être que ce l'est maintenant avec ton geste plutôt démonstratif. La question de l'intervenante ne te fait pas rire... Parce que t'es fucking juste là. Et tu sais... Tu sais qu'ils parlent tous de l'ancien toi. Mais t'es là. C'est dur. C'trop dur même pour toi. Et tu te retiens de respirer... Non en fait, t'y arrive juste pas. Mais t'es patiente et tu fixes encore le sol, en te retenant fortement de ne pas trembler ta jambe, parce que ce serait trop évident qu't'angoisse.

Et t'es pas ici pour te plaindre ou penser à toi-même.
T'es ici pour l'écouter.

Suite à la question, t’secoues la tête ; t’es pas rendu-là . Quand on est reparties.. j’venais d’ouvrir une énièmes bières. J’étais complètement saoul.. t’hoquettes. Elle.. avait ses jambes sur le banc et.. et.. respire, Charlie. Respire. Tu t’retiens d’éclater en sanglot j’ai voulu éviter l’animal dans l’chemin et ont à prit l’bas d’la petite falaise. Enfin, d’la côte ? On a fait des tonneaux et ont s’est arrêtés sur un arbre. Elle était inconsciente... pas moi. Elle s’était frappée contre son genoux et ensuite bah un peu partout dans l’auto. J’pensais littéralement que j’l’avais tué. J’l’ai sortie.. j’paniquais.. je... j’avais peur d’l’avoir tué. Elle respirait presque pu.. je... j’ai appelé les ambulances parce qu’elle comptait plus que mon permis ou que les conséquences.. t’hoquettes de nouveau, essuyant ton nez. j’ai finis au poste de police. Elle a l’hôpital. Ils m’ont cuisinés pendant des heures. Des heures interminables. J’avais froid. J’avais faim. J’avais peur.. j’avais peur d’la perdre. Son père est venu m’voir... ouais il était et est encore flic by the way. Et j’avais plus l’droit d’l’approcher. Il a conclut un deal avec monsieur Rhode... on repartaient à Denver, pis j’allais pas en taule pour jeune délinquant et mes parents n’se feraient pas poursuivre en justice. Ils ont acceptés. Tu parles d’Avana à la troisième personne parce que t’vas éclater si tu l’fais tout de suite. Deux semaines dans le coma. Quand elle s’est réveillée.. elle se souvenait plus d’moi. Sa mémoire à court terme à été affectée. J’suis aller la voir une fois. Et j’suis parti parce que j’avais pas le choix. Tu te mets à sangloter, là, devant tout le monde. C’que j’lui dirais.. haha rire sarcastique. Cette fille-là je l’ai rencontré 9 ans plus tard dans un festival de musique. J’voulais la garder loin d’moi mais j’y arrivais pas. Pendant 1 an j’lui ai mentis. J’ai été un trou d’cul pour la repousser... qu’elle parte parce que j’y arrivais pas moi. On à été ami.. puis amant.. puis ex. Et cette fille-là c’est ma blonde aujourd’hui. Tu te tourne enfin, légèrement vers Avana. Pis j’suis tellement désolé bébé.. et là, t’éclates en sanglot.

La question est arrivée trop tôt et Charlie le fait comprendre, en continuant son récit, ignorant complètement la question pour l'instant. Il ne t'apprend rien concernant l'accident, car ce sont des passages qu'il t'a déjà raconté la dernière fois... Ou des choses que tu as déjà semi-entendues par tes parents, ou lu dans le journal. Cependant, t'apprend officiellement en même temps que tous les autres comment ton père l'a fait mariner et comment il lui a empêché de te revoir. C'est à cause de cet accident qu'il est retourné à Denver et tu ne savais pas ça non-plus. Ta main caresse doucement sa cuisse, t'es nerveuse, mais le plus gros morceau a déjà été dit et il ne restait plus grand chose à raconter avant d'avoir terminé. Même si chaque mots qu'il prononce te blesse un peu, ça ne change pas le fait que t'es fière de lui pour avoir réussi à s'ouvrir devant autant de gens... Y compris toi, mais aussi lui-même. Il termine en parlant de votre passé plus récent... puis s'arrête à votre présent. Charlie revient à la question initiale et se tourne vers toi pour te faire ses excuses les plus sincères.

Le visage inondé, tu hoches la tête et pince les lèvres, pour ne pas goûter à tes larmes salées. Il éclate en sanglot et tu penches la tête sur le côté, tout en caressant encore sa cuisse. Le silence engloutis la pièce, mais le bruit de vos sanglots viennent le perturber. Quelques personnes vous accompagnent dans l'émotion, y compris l'intervenante qui garde ses questions pour elle pendant un court instant. Puis, en voyant que tu la regardes de nouveau, elle se permet de te demander. Est-ce qu'il y a quelque chose que tu voudrais lui répondre ? Tu clignes des yeux et jette un coup d'oeil rapide aux autres personnes dans le cercle avant de regarder Charlie. Je... Tu ? Tu ne sais pas quoi dire. Non en fait, c'n'est pas ça... C'est juste que t'aime pas avoir l'impression qu't'es le centre de l'attention et même si c'est pour Charlie, ça reste tout de même un peu ça en ce moment puisque t'as le droit de parole. Je t'aime. Et je te pardonne. Dis-tu doucement, en trouvant un certain réconfort à le regarder rien que lui, yeux dans les yeux. Comment te sens-tu, Charlie ?