Nulle fuite lorsque l'ombre du futur grandissait au sein de la terre aimante, lorsque l'aimée devenait mère à chaque seconde, éclosant comme une fleur qu'il n'avait pas suffisamment bien pris soin. Elle était là. Derrière cette porte. A quelques mètres seulement et toute son assurance s'évaporait comme de la neige en été, il fondait devant les craintes, perdant du mordant qu'il avait pu avoir lorsque de sang froid il avait muselé ses craintes pour ne pas accentues les siennes. Pourtant, il avait peur Lieven. Bien plus peur qu'il n'en avait jamais éprouvé auparavant, la sensation tétanisante de jouer en cet instant sa vie mais cela était bien plus que ça, car ce n'était pas la sienne, mais bel et bien une autre qui était en jeu. Il n'avait pas le droit de faire un faux pas, il n'aurait plus le droit de faire un mauvais choix. Sa posture est droite, il ne laisse pas une simple micro-seconde sa peur émaner de son être entier, pas alors qu'elle devait être encore plus affolée que lui. Pas alors que c'était elle qui portait en elle le plus important choix d'un être. Il n'avait pas envie de suivre une idéologie qui ne lui correspondait pas, d'être responsable de la mort de ce même être qui n'était même pas encore formé, mais pouvait-il être responsable d'une vie à la suite ? Les doigts frôlent les mèches blondes, folles, il ne s'était pas coiffé, ses nerfs en acier se corrodaient au point où il craignait qu'une discussion trop longue puisse l'éreinter et mettre fin à cette façade qu'il avait créé de toutes pièces pour n’inquiéter personne et surtout pas elle. "Tu m'inquiètes vraiment..." Lui avait écrit Elijah la veille, sans même savoir que lui, en interne était tétanisé en sachant que ses limites étaient craquelées et presque brisées. Cependant, il n'avait pas d'autre choix que celui de tenir. Alors, la porte qu'ouvre enfin, il s'approche, embrasse le centre de son front avec timidité. " Hey. Comment vas-tu ? " Car l’inquiétude est présente entre tous les sentiments négatifs qu'il ressentait en ce moment, entre toutes ses fêlures. " Est-ce qu'on peut parler ? De ce qui se passe. De ce qu'on doit décider. " C'est si dur d'aborder ce sujet, de l'effleurer à peine mais il se force, il se blinde, pour elle. Pour eux. Il n'a pas le choix.

@Gaïa Soriano  

Elle avait fermé la porte du paradis, assise au milieu de la pièce, les opales fuyant vers un horizon inexistant. Elle était revenue ; s’enchaînant de nouveau dans sa terreur. Broyée par ce sentiment, elle n’avait plus eu d’appétit. Cette grande chambre, qu’elle avait investie depuis un moment déjà, et qu’aujourd’hui elle allait bientôt quitter pour un certain nombre de jours. L’incertitude glaçait son sang, le myocarde s’arrachant un peu plus de sa poitrine à mesure que raisonnaient les pas dans le couloir. Gaïa était dans le pire des états possible, sa psyché était un no man’s land, pourtant elle se redressa, séchant les quelques traces de larmes qui avaient pu couler. Elle arrange ses, et lorsque la porte s’ouvrit sur lui, un sourire étira faussement ses lippes. Qu’elle était douce et risible leur comédie, chacun essayant de berner l’autre pour le rassurer. « Encore un peu chamboulé vis-à-vis d’hier, mais ça va et toi ? » Gaïa attrapa avec une infinie douleur la main de cet être qu’elle chérissait tant. « Oui on peut en parler chéri. » elle l’entraina avec elle tandis qu’elle prenait place sur son lit, lâchant la main de son tendre bien aimé pour agripper son ours en peluche, le serrant fermement contre elle. « je … je ne sais pas trop par où commencer, mais s’il te plaît Lieven, ne dit pas une seule fois que tu as gâché ma vie ou quoi que se soit dans ce genre, c’est entièrement faux, compris ?! » un brin d’autorité, beaucoup de craquelures dans la voix, et la sonorité qui raisonnait presque trop doucereuse pour un ordre aussi catégorique.

Ces paroles qu'il ne se sait pas encore capable de prononcer, d'assumer. Tout c'était écoulé si vite entre eux, en quelques simples jours leur monde avait basculé. Il n'avait suffit que d'une soirée pour tout bouleverser, tout remettre en question. Que d'une simple phrase, d'un simple instant pour que sa relation avec Elijah vrille. Que de deux semaines pour que leur vie tende en pente-descente. Il n'est pas sûr de pouvoir faire le bon choix, ni même d'avoir pu un jour en faire un. Pourtant, lorsque leurs sourires tristes se répondent, il ne peut s'empêcher de se retrouver dans son chagrin. De réaliser qu'il y avait bien une seule décision duquel il était fier : celle de l'avoir laissé rentrer dans sa vie et ne jamais en sortir. Les phalanges s'effleurent, comme lors d'une toute première fois, il y a toute la tendresse qu'ils n'ont pas pu s'offrir pour cause de l'agitation. Il aurait tant désiré la tenir entre ses bras, l'enlacer avec force, jusqu'à n'en plus pouvoir. Caresser sa chevelure d'un blond ensoleillé puis lui murmurer qu'au dehors, là dehors, juste en passant la porte il y avait une tempête immense, mais qu'elle serait à l'abris auprès de lui. Hors, il n'en est plus sûr Lieven. Les bras tremblent tout autant que les lèvres lorsqu'il se les mord, le palpitant peine à maintenir la cadence, les pensées sont noyées sous les peurs. Rien n'est stable. La tempête ne se trouve pas au dehors, elle est ici, auprès d'eux et elle n'a jamais sonné aussi bruyante qu'en cet instant. Leurs pas se suivent, les couloirs sont trop connus et le lit, il a été leur paradis il y a deux semaines. Ses premiers mots le surprennent (( Gaïa en elle-même a toujours été surprenante )) néanmoins il la reconnait là et le sourire demeure sur les lèvres décharnées. " D'accord, d'accord. Je ne le dirai plus, si tu acceptes de ne pas le dire en retour. " C'était sa seule condition pour que ça marche, pour que leur discussion en tombe pas en redondances d'excuses qui n'arrangeraient pas le problème. Les yeux se baissent sur ses larges paumes, Lieven hésite, il est peut-être trop jeune mais il ne sera jamais lâche auprès d'elle. " Je ne sais pas ce qu'on doit faire. Pas le concernant. C'est si dur, c'est prendre la responsabilité d'une autre vie que la mienne. Autant je peux foirer me concernant, mais je ne pourrai jamais le faire le concernant. " Il n'en avait pas le droit, c'était peut-être trop tôt, assurément, mais le choix n'aurait pas été plus aisé, même après des années. " Gaïa, je ne veux pas que ça foute ta vie en l'air. Tu peux encore faire de si belles choses, tu les fais déjà et je sais, je sais que si on le garde tu seras la plus belle mère du monde. Je n'en doute pas un instant, pas un seul instant. Mais qu'est-ce que ça te coûtera ? " C'est si dur de prononcer ces mots paraissant injustes, la gorge brûle, les larmes auraient pu monter et dévaler ses yeux s'il n'était pas aussi maîtrisé, aussi déterminé à ne jamais se fragmenter devant elle.

En regardant bien son corps, on pouvait voir ses quelques cernes, sa silhouette affaiblie, et cette misère qui s’échapper de son aura. Son visage était buriné par l’angoisse. On apercevait dans ses yeux la peur, la souffrance et le désespoir, qu'elle essayait tant bien que mal de cacher derrière des tonnes de sourire et de geste tendre. Jamais elle n’avait été aussi faible. Elle ne pouvait guérir de cet amour qu’elle lui portait, à lui, mais aussi à Elijah. Sous le joug de leur dispute, elle avait eu l’impression de se retrouver entre deux fauves. Le myocarde se sert si fort dans sa petite poitrine qu’elle semble presque manquer d’oxygène. « J’accepte. » elle ne chercher plus à faire de longue phrase très embellie. Elle l’écoute, décortiquant chacun de ses mots, mais parfois, rien ne se passe comme on le voudrait. Elle avait encaissé chaque syllabe comme une déferlante, nouant son estomac un peu plus, serrant sa gorge, et surtout créant d’autant plus de craquelure sur son doux masque de sourire. « ASSEZ ! » Petite furibonde blonde, se secouant fortement pour se relever, plongeant ses opales dans c’elle de Lieven, et lâchant un profond soupire. « Pardon d’avoir crié. » Elle s’agenouilla prêt du lit, prenant ses mains dans les siennes. « Chéri, personne ne le sait vraiment, mais mon but n’est pas de faire des études poussées, ou concrète, j’ai simplement pris de quoi patienter pour pouvoir intégrait le FBI quand j’aurais 24 ans. Voilà ce que sera mon avenir, alors non cet enfant ne gâche absolument pas mes études où quoi que ce soit d’autre. » Les paupières lui semblent être de pierre, et alors que le teint pâle blêmit encore un peu plus, elle soupire avec douceur, rouvrant les yeux pour les poser sur lui. « Je ne sais pas ce que l’on devrait faire, comme tu le dis on est jeune, et sa vie dépendra de nous, comment être certain que l’on sera de bons parents ? » Elle se morfondait, préférant se persuader qu’elle ne serait jamais une mère digne, et qu’elle ne pouvait rien offrir de bon à cet enfant hormis un père fantastique. Elle avait besoin de lui, de sentir qu'il pouvait l'aimer encore malgré son esprit morcelé.

Jadis, il y avait eu des étoiles en ses yeux, les plus belles astéries qu'il n'avait pu contempler, arrachées au ciel pour plonger dans l'iris de celle qui était comme la Terre Mère pour lui. Jadis, elle avait sourit comme personne ne l'avait fait auparavant, créant l'éclaircie même dans son univers au combien il avait pu tout perdre, de trop nombreuses fois enfant. Désormais, il n'y retrouve plus autant cette étincelle, quelque chose s'est fané chez elle aussi, le temps les avait démunis. Ainsi, lorsque son cri répond à ses mots, les lippes sont cousues, la trachée se resserre et la voix du cœur se tait sous la complainte de son agacement. Rares, trop rares sont les fois où elle hausse la voix en sa présence, par sa faute et il ne peut que soigneusement baisser la tête et attendre. Lieven entremêle ses doigts l'un contre l'autre, la gorge se dévoile lorsqu'il hausse la tête, plonge les prunelles dans les siennes, patiente sans jamais s'offusquer de sa soudaine colère. " Ce n'est rien, ne t'en fais pas. Je ne pourrai jamais t'en vouloir pour ça. " Cette fois-ci, leurs mains se rencontrent et chaudes se frôlent dans la suavité, le simple fait de la toucher le ramène au présent, l'actuel, à eux deux avant de pouvoir penser à eux trois. Chacun de ses mots est pris en compte, récupéré, analysé et la première crainte refait surface. Il ne veut pas la perdre, jamais. " J'ai déjà tant de mal à accepter le fait que tu veuilles t'orienter là-dedans. J'ai peur de te perdre à cause de toutes les horreurs que font les gens. J'ai peur que tu te perdes, parce que tu as un trop grand cœur pour eux. " Les anciennes hantises refont surface, comme un message abandonné que l'on retrouverait porté par les vagues. Lorsqu'il remonte sa paume, ce n'est que pour caresser ses traits attristés, réchauffer la pâleur de sa peau de sa chaleur absente. " Gaïa, regarde-moi. " Dit-il de sa voix attendrie, dont les derniers restes de chaleur humaine lui sont intimement et uniquement réservés. Son index caresse le bas de son menton, il le relève, effleure quelques mèches de ses cheveux sans jamais en tirer ne serait-ce qu'un fil. Tout est fait avec une tendresse infinie, comme si elle était porcelaine et lui, qu'un aveugle maladroit de plus hypnotisé par son aura. " J'ai eu une mère... qui a été ce qu'elle était et que je ne pourrai pas, malgré tout le respect et la bienveillance du monde qualifier de bonne. Alors, je peux t'assurer avec l'expérience que j'ai, avec tous les parents que j'ai pu rencontrer, que ce soit les miens, ceux de mes proches ou durant mes voyages que tu serais une maman exceptionnelle. " Rien ne lui semble plus juste, car avant même de devenir son amie, avant même de devenir une part de lui, elle avait été cette mère qu'il n'avait jamais eu et qui avait donné sens à ce mot méconnu par lui. Doucement ses yeux remontent pour fixer l'horizon, pour la première fois depuis son arrivée, il parait un peu plus apaisé, presque rasséréné et sa main elle, ne cesse de la cajoler auprès de lui en une caresse qu'il espère, sera aussi réconfortante que sa présence pouvait être pour lui. " S'il y a une seule chose que j'ai appris de mon vécu avec elle, c'est que ce n'est pas tout ce que tu donnes qui importe réellement à un enfant. Ce n'est pas ce que tu achèteras, ce n'est pas toujours ce que tu diras ni les reproches que tu feras. C'est le temps que tu donneras et ce que tu feras pendant ce même temps avec ton gosse. C'est les valeurs que tu transmettras, les raisons pour lesquelles tu choisis ce choix plutôt qu'un autre pour le permettre d'être la meilleure version de lui. Les raisons pour lesquelles qu'importe les erreurs que tu feras tes enfants reviendront toujours vers toi, car ils s'y sentiront à l'abri. Ça, je le sais grâce à mon père qui même s'il m'a élevé à la dure, m'a appris que c'était ça la vrai valeur d'une éducation. " Et c'est si étonnant comme ses simples souvenirs, ce simple apprentissage parvenait à chasser quelques uns des nuages qui peuvent s'acharner à masquer son soleil.