Ton pied bat nerveusement la mesure. Tes pupilles se sont déconnectées du tableau et devant toi, le décor n’est plus aussi précis. Ce cours est interminable. Du réchauffé. Les aiguilles tournent lentement dans l’horloge fixée au mur. La voix monotone du professeur devient hypnotique, soporifique. Ton visage dormant dans la paume de ta main, un filet de bave est sur le point de s’échapper lorsque vous êtes enfin libérés. Enfin, c’est plutôt le remue-ménage des étudiants qui t’alerte et te réveille soudainement de ta somnolence. C’est le signal tant espéré, celui qui va te guider vers la liberté et surtout vers cette femme étrange que tu espionnes depuis ces derniers jours. Tes affaires engloutis par ton sac, tu rentres à l’appartement et salues un de tes voisins promptement. Pas le temps de s’attarder. Une douche plus tard et quelques réponses à des mails, tu te retrouves à pédaler sur ta bicyclette, ton appareil photo se reposant dans le panier à l’avant. Le vent brosse ta tignasse et caresse ta peau pâle. Le soleil quitte la côte. L’ambiance change, comme si quelqu’un avait appuyé sur un interrupteur. Un frisson parcourt ta colonne. L’appétit se lève. T’as faim de nouveautés, d’éléments croustillants sur cette hors la loi. Planquée devant chez elle, tu observes sa silhouette se mouvoir de pièce en pièce jusqu’à ce qu’elle se décide à sortir. La laissant prendre de l’avance, tu enfourches ton deux-roues en retard et termines ta poursuite discrète devant .. une boite de nuit. Le seul endroit que tu redoutes le plus, plus que l’Enfer. Toi qui avais réussi à éviter ce type de lieu, te voici prête à faire ton baptême. Ton véhicule vintage sécurisé, tu inspires profondément et pénètres avec réticence à l’intérieur de ce chaos. D’emblée, la musique attaque tes tympans et les lumières niquent tes rétines précieuses. Ta maladresse collée à la peau, tu écrases le talon d’un homme et lances un coup d’coude involontaire dans les nichons impressionnants d’une nana. « Pardon pardon » Putain, elle est où l’autre ? C’est pas ton terrain de jeu favori celui-là. Trop de distractions. #rplibre

Nouveau en ville, tu avais entendu parler de cette boite de nuit, de ce quartier qu'était Los Feliz. Un quartier plutôt tendance donc tu t'étais dis que la boite allait être tout aussi bien. Tu n'as rien contre les quartiers mais tu n'allais pas faire exprès de traîner dans des endroits ou les voitures de luxe ne sont pas les bienvenues. Ta journée avait été des plus ennuyantes, tu avais enchaîné réunion par-dessus réunion au bureau, tu étais même le dernier à quitter le bâtiment. Sous un soupir tu enfourchais ta moto et te dirigeais vers ta demeure. Tu voulais prendre une douche et te changer avant d'aller faire la fête. Une fois sorti de la douche et les cheveux bien placés tu enfilais ta tenue. Il t'avait pris qu'une heure avant de te rendre au club, le trafic semblait en ta faveur ce soir. Tu entrais dans cet établissement et regardais les gens danser au rythme de la musique . Tu t'avançais dans la foule , tu coin de l'oeil tu remarquais les bousculades et voyait cette fille, appareil photo en mains, qui ne semblait pas dans son élément. Avant que les choses ne s'enveniment et probablement par curiosité tu t'approchais de la scène.

Est-ce que ça va?

T’as perdu sa trace. Même son parfum de catin s’est dissipé. C’est la débandade. Tes doigts longs et fins s’accrochent à ton appareil pendant à ton cou. C’est pas ton milieu naturel, oh que non. C’est comme si on avait foutu Barbie en Irak. Vous imaginez Barbie en talons avec un sniper ? Les verres se cognent près du bar. Les mains sont baladeuses. Les corps s’entrechoquent. N’étant pas la plus tactile des femmes, tu t’empourpres en une fraction de seconde. Pauvre petit coquelicot. Toute cette foule te file le tournis. La musique n’a rien d’agréable, ce n’est qu’un son semblable à un marteau-piqueur creusant du béton. Désorientée, tentant de ne pas oublier ta tâche principale, tu tournes sur toi-même, cherchant ta cible, cette blonde peroxydée qui trempe sûrement dans un réseau de prostitution. Et si c’était ici son terrain de chasse ? Et si elle choisissait des candidates désespérées pour le trottoir dans les boites de nuit ? C’est probable. En observant les filles qui se déhanchent, peu semblent allier beauté et intelligence. Ton tour d’inspection se terminant, un homme déboule devant toi, frais et .. exotique. « On se connaît ? » C’est bien toi ça, répondre à une question par une autre. Pendant ce temps-là, la fête se poursuit autour de vous. Il ne manquait plus que ça, un intrus dans ta quête. Tu peux pas lui balancer un coup d’pied comme une cannette de coca en pleine rue. C’est un être humain et tu as été bien élevé. « Je vais bien merci, un peu déboussolée, je n’ai pas l’habitude de traîner dans ce type de soirée » Sur ces paroles polies, tu ajoutes un sourire et lâches ton appareil sur ta poitrine. Poitrine recouverte d’un sweat et jambes se baladant sous un .. jogging. Dégaine étrange pour aller en boite de nuit hein. « Vous êtes aussi venu seul ? »

hj : han, merci de me sauver de ma solitude

Tu souriais à sa question. Une réponse par une question est toujours plutôt amusant. De ton accent de New York tu lui répondais simplement. Je ne crois pas non. Tu la regardais, avec son appareil qu'elle venait tout juste de relâcher, tu te doutais bien qu'elle n'était pas ici pour s'amuser, elle devait probablement être sur la piste de quelqu'un. Surtout avec ce pull, elle devait avoir chaud. Peut-être étais-ce à cause de cela qu'elle semblait avoir le vise empourpré. Déboussolée comme elle le disait, oui ça paraissait bien. Tu es certaine que ça va? Ton visage semble rouge. La place commençait à bien se remplir et les gens s'entassaient de plus en plus. Tu remarquais qu'une fille un peu trop saoule dansait les deux mains vers le ciel, un peu plus et elle manquait de frapper la jeune demoiselle avec son coude. Juste à y penser la soûlone se retournait rapidement, tu as eu le temps de justesse de bloquer le coup à l'aide de ta main. Oui je suis venu seul. Tu regardais autour de toi, vous étiez en plein milieu de la piste de danse. On devrait peut-être s'écarter si tu ne veux pas avoir ton appareil brisé. Disais-tu en pointant son petit bijou antique, sourire accroché au visage. Ce serait bien dommage.

Non, vous ne vous connaissez pas. T’as une mémoire visuelle du tonnerre, et lui, tu ne l’as jamais vu pour d’vrai, même si un doute persiste. Peut-être que tu l’as croisé dans les couloirs de la fac. C’est plus grand que l’océan cet établissement. À vrai dire, tu t’en fous un peu, si tu commences une enquête à chaque fois que tu rencontres quelqu’un, t’as pas fini ma jolie. Ton thermomètre ne cesse de grimper. C’est pire que de la fièvre, t’es une torche humaine là. « Il doit être rouge. Je suffoque dans mes vêtements, si j’avais su, j’aurais sorti le bikini » Proche de lui, tu ressens une espèce d’étrange sécurité et sérénité. Oui, au milieu de ce vacarme qui ne t’est pas familier, cet inconnu crée une bulle d’oxygène tout à fait appréciable. Il te maintient concentrée et t’éloignes de la crise de panique. Il se fait chevalier de ta personne et écarte des menaces que tu ne captes même pas. Un ange tombé du ciel. Les décibels toujours aussi puissants, tu lis désormais sur ses lèvres pour comprendre ce qu’il raconte. Approximativement, tu saisis ses propos et acquiesces en t’éloignant avec lui pour trouver un coin moins parasité. Enfin à l’écart des basses répercutant le son lancé par le DJ, tu vérifies ton appareil et tends avec raideur ton bras en direction du jeune homme. « Je m’appelle Astrid et toi ? » Tant pis pour le blondasse. Il semblerait que la chance soit avec elle ce soir. « Sympa le pantalon en cuir et le haut transparent, il manque plus que le fouet ! » Tu t’esclaffes, ne songeant même pas à ce que tu puisses perturber et énerver ton adorable sauveur.

Avec cette musique assourdissante, malgré le fait que tu avais l'habitude de ce bruit aussi fort, tu n'avais pas pour autant l'habitude de discuter. Danser était l'activité du club. Alors oui, il a fallu que tu te penches un peu vers l'avant pour mieux l'entendre. Tu riais au seul mot que tu avais compris, bikini, effectivement il faisait très chaud. Après lui avoir proposé d'aller plus loin, tu te frayais un chemin dans la foule tout en faisant bien attention que la jeune femme puisse bien te suivre. Dans un coin plus calme, vous pouviez maintenant vous entendre parler. Tu regardais son bras s'étendre d'une raideur vers toi, elle te tendait la main. Tu prenais sa main de tes deux mains et serrais, geste qui était naturel pour toi et qui malgré les années à vivre en Amérique, c'était une habitude qui ne t'avais jamais quittée, cette poignée de main typiquement coréenne. Tu peux m'appeler Jackson. Elle qui faisait remarquer ton accoutrement te faisait bien rire, en plus d'être mignonne elle était drôle. Justement tu ne l'aurais pas vu? Je crois que je l'ai égaré quelque part. Le sens de l'humour ça te connais, rire était dans ta deuxième nature. Après quelques secondes tu reprenais quelque peu ton sérieux. Alors dis-moi qu'est-ce qui t'emmène par ici? Évidemment, ça semble quelque peu imprévu. Oui tu étais curieux, tu ne pouvais t'empêcher de demander.

On te l’avait encore jamais faite celle-là. T’envelopper la paluche à deux mains pour te saluer. Probablement une coutume d’ailleurs. De son ailleurs à lui. En même temps, plus aucun jeune ne se présente de la sorte à présent. Il n’y avait que toi et ton âme de vieille qui pouvait faire un truc pareil. Qu’il ne t’en tienne pas rigueur, tu peux aussi être fun, faut pas croire. « Jackson ? Original pour .. J’veux dire, je n’y aurais jamais pensé une seule seconde » C’est plutôt afro-américain non ? Encore des préjugés Astrid. Tu voulais qu’il s’appelle comment ? Min-Ho ? Abandonne, tu ne ferais que t’enfoncer sur ce terrain-là. Au moins, ça casse les codes et toi, t’adores ça. Tout comme sa tenue plutôt osée pour un homme. Quoi ? Le cuir, c’est ambigu sur un gars. Ça donne matière à réfléchir. Heureusement, ton ange-gardien est doté d’humour et répond volontiers à ton espièglerie. « Je suis désolée monsieur, je n’ai rien vu de la sorte, mais j’pourrais vous en offrir un, j’crois avoir vu un sex-shop pas très loin » Tu glousses, peu habituée à parler de cul avec un pur inconnu. Et puis l’ambiance euphorique s’écroule lorsque ce fameux Jackson te rappelle la raison de ta venue. « Tu es plutôt perspicace. J’étais sur la trace d’une femme que je suspecte d’être au coeur d’un réseau de prostitution, mais elle m’a glissé entre les doigts. » Au moins t’es cash, c'est pas comme s’il allait ruiner ton enquête et qu’il connaissait à coup sûr ta soupçonnée. Et puis ce n’est qu’un échec, mais tu sais toujours où elle habite et tu continueras de la traquer une prochaine fois. Les épaules qui se haussent,  ton regard qui se baisse, une moue de déception qui traverse ton minois et tu te rallumes. Il est pas venu ici pour réconforter une nana, bien au contraire. « Bref, vas t’amuser, t’as pas enfilé ce super pantalon moulant pour remonter le moral d’une rousse en pyjama non ? »

Ton sourcil s'arquait lorsqu'elle disait ces mots: original pour... Oui elle s'était bien reprise, toi qui croyais qu'elle allait vraiment faire cette remarque, quoique, c'est vrai Jackson n'est pas un prénom que tu associes à un Asiatique. Puisqu'elle s'était bien rattrapée tu balayais cette remarque en faisant une blague, parce que pourquoi être sérieux dans la vie? Ce n'est pas comme si ça t'affectait pour autant, à tous les jours tu entendras ce genre de commentaires. C'est mon prénom américain, au moins je ne m'appelle pas Bernard. Tu rigolais de plus belle, surtout lorsqu'elle renchérissait avec cette histoire de fouet et de sex-shop. Ouais décidément elle te plaisait bien, à première vue, mais elle qui était sur la piste d'une blonde. Tu devais faire attention, elle semblait trop curieuse cette fille, qu'est-ce que ça pouvait bien lui faire si sa proie était une prostituée? C'est son choix non? Serais-tu en train de converser avec une Ah je vois, tu es paparazzi? tu assumais, parce qu'avec son appareil photo et sa quête de prendre le cliché choc, ça ne pouvait qu'être ça. Elle semblait déçue d'avoir perdue cette poursuite, sa moue ne pouvait dire le contraire. Tu fronçais les sourcils et fis presque le saut quand elle changea d'attitude du tout au tout. Ton sourire ne quittais pas ton visage. Elle était bien plus intéressante que ce club, et puis, tu pouvais revenir ici quand tu le voulais, elle, tu ne la reverrais peut-être jamais. Meh, j'ai vu meilleure ambiance. Je suis un peu déçu, j'ai sorti mes pantalons de cuir pour rien... Un pyjama aurait été nettement plus confortable. Tu haussais des épaules. Qu'allait-elle faire? Te planter là et continuer sa chasse ou rester avec toi?

C’est bon, il a dû te cataloguer dans les racistes. T’aurais pu éliminer ce commentaire, même si tu n’es pas allé jusqu’au bout de ta ‘logique’. Tu l’as vu, ce rictus de gêne qui a traversé son minois. C'est des choses qu’on garde pour soi Astrid, mais toi, tu dis tout haut ce que tu penses tout bas, quitte à t’attirer des ennuis. Sérieusement, tu devrais remercier le petit Jésus ce soir, parce qu’il a été cool ce jeune homme. Supporter ta lourdeur n’est pas donné à tout le monde. Ce gars est vachement patient. « Aaah, donc tu as un autre prénom pour un autre pays, c’est cool ça ! Moi aussi, j’m’appelle Esmerelda en Espagne » Abrutie finie, tu te fends la poire toute seule, postillonnant sûrement lui sans t’en apercevoir. Et malgré le caractère déroutant de votre conversation suivante, tu t’enfonces dans votre délire désormais mutuel. Pour la première fois de la soirée, tu sembles enfin en accord avec l’ambiance générale. T’es une fille qui se marre parmi tant d’autres et qui fais la connaissance d’un homme. Le truc qui s’passe dans toutes les boites de nuit. « On peut dire ça » Une paparazzi pour grands délinquants. Ça t’arrive même de vendre des scoops aux journaux, un peu comme Peter Parker, sauf que toi, t’as pas la capacité à tisser des toiles pour te balader d’immeuble en immeuble. T’es qu’une humaine et aucune araignée radioactive t’a piqué. Maintenant que ta cible s’est envolée, autant profiter de cet endroit et de ta rencontre inattendue. Comme te dirait ton père : « N’oublie pas de profiter de ta jeunesse, on en a qu’une ». Et bien, il semblerait que ce soit l’occasion ou jamais. « Ça dépend quel type de pyjama, j’suis pas loin de crever là. Faudrait qu’ils investissent dans une clim’, à moins que ce soit une technique pour déshabiller tout l’monde » Ton index soulevant ton pull de ta poitrine, tu halètes exagérément tout en enviant le type qui sirote un verre en arrière-plan. « Jackson, aurais-tu un peu de fric pour me payer un cocktail ou de quoi me désaltérer ? Je te propose de te rembourser dès demain si tu me donnes tes coordonnées » Si t’avais su que tu finirais dans un four, t’aurais pris ton porte-monnaie. Damn it.

Bon eh bien décidément au lieu de couler comme une brique, elle avait décidé de continuer dans son délire. Tu remarquais bien rapidement qu'à son attitude ce n'était pas méchant et probablement qu'elle parlait plus vite qu'elle ne pensait. Et puis des commentaires, tu en auras toute ta vie, ce n'est pas aujourd'hui que cela va changer.Ah je vois Esmeralda, eh bien moi c'est Jet Li, enchanté. Un sourire qui se cachait derrière cette lèvre mordillée. D'humeur joueur, elle était synonyme de bonne compagnie, tu allais probablement passer une bonne soirée. Enfin, tu devais tout de même faire attention, elle-même venait d'avouer qu'elle était paparazzi. C'était décidé, cette femme ne mettra pas le pied chez toi, quoique jouer avec le feu était tout de même excitant. Tu n'avais rien à cacher, ah si, peut-être la poche de hockey pleine de weed qui traînait probablement... Tu faisais signe au bar-tender, puis tu redirigeais ton attention sur la jeune femme qui semblait mourir de chaleur. C'est évident qu'ils veulent tout le monde à poil! Le serveur s'approchait pour prendre ta commande, elle-même te proposait de te rembourser. Allez commande ce que tu veux et oublie le remboursement... Par contre, je prendrais bien tes coordonnées, qui sait peut-être que je vais avoir un scoop pour toi?